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Chitan El Kayla : ce bide retentissant

Après une absence remarquable, Moez Kammoun, réalisateur tunisien confirmé a effectué son grand retour sur grand écran en présentant son dernier long métrage baptisé "Chitan el Kayla" ou "La sieste du corbeau" à un public venu nombreux l'accueillir à la salle du Colisée de Tunis dans la nuit du 5 janvier 2018 et ce, en présence de l'équipe du film. Enthousiasme collectif, attente, suspense étaient au rendez-vous… juste pour un court moment, le temps de faire les présentations et d'affliger aux invités le bide de l'année.

2015, 2016 et 2017 …. trois années qui ont vu défiler une panoplie d'artistes, scénaristes et réalisateurs méconnus au départ mais qui n'ont pas tardé à s'imposer grâce à leur talent. Ils doivent d'ailleurs leur appellation élogieuse de "nouvelle vague" à leurs accomplissements couronnés de succès à l'échelle nationale et internationale. Toujours dans la même lignée, le public s'attendait de la part d'un réalisateur tel que Moez Kammoun à voir une œuvre à la hauteur, présentable convenablement esquissée sur grand écran grâce aux outils de base scénaristique qui constituent un film, aussi bon ou médiocre soit-il … Seulement, le produit présenté fait un bide et l'avant-première a finalement pris l'eau sous les huées d'un public mécontent.

 

"Où est le film ? "   

 

Expression récurrente qui a retenti aux quatre coins de la salle et pour cause : pendant plus d'1h20, le spectateur n'a pas pu s'emparer d'un fil conducteur,  fondement même d'une intrigue. Au gré des plans de coupe et de scènes éclatées, des acteurs de talents errent comme Souhir ben Amara, Abdelmonaam Chwayat ou encore Fethi Akkari, deux piliers du théâtre tunisien. Foued Litayem et Ali Khemiri complètent le casting.  

Le film présente fatma, une jeune femme qui se retrouve contrainte de partir au désert et d'ouvrir un restaurant touristique, juste après la sortie d'Ibrahim son mari, de prison.  Tous les deux partent dans l'espoir d'entamer une nouvelle vie. Une fois installés au désert, Ibrahim rencontre Mokhtar, un chercheur de trésor, véritable charlatan , rongé par de nombreux desseins : dont celui de mettre la main sur un trésor caché et de rencontrer une jeune femme qui dissipera "ce mauvais sort" l'empêchant de procréer. Il s'agit là des grands axes du film cités notamment dans le synopsis officiel.

Sur un rythme monotone, les scènes défilent abondamment alimentées d'images qui ne parviennent pas à susciter le moindre intérêt. Les  acteurs qu'on a du mal à reconnaître s'ennuient,  devant un public lassé d'attendre assommé par un dialogue tout aussi fade. L' œuvre est totalement dépourvue de rebondissements et finie en queue de poisson sous les hués des spectateurs. Le tandem ben Amara / Chwayet n'a pas convaincu. Tous les deux ont pourtant brillé dans des œuvres récentes comme Mustafa Z de Nidhal Chatta ou El Jaida de Salma Baccar. Quant à la présence mystérieuse de certains personnages, elle demeure injustifiable voire incomprehensible.


Un discours critiqué :

Durant la présentation qui a précédé la projection, Moez Kammoun et l'équipe se sont donnés à cœur-joie dans les éloges, étalant "leur effort monumentale" loin d'être à la hauteur du résultat final. Ils ont aussi évoqué les conditions de tournage difficiles dans des décors naturels arides. Le tout après avoir levé le voile sur le détournement en ligne de l'affiche officielle du film forcément clichétique, ou on peut voir le personnage incarné par Souhir ben Amara laver son linge sale : un poster titrée d'un commentaire : "La star du cinéma tunisien". L'équipe du film s'est aussi empressée d'affirmer qu'ils n'étaient pas à l'origine d'un tel détournement … Seulement autant de justifications n'intéressent que très peu un public venu seulement profiter des aléas d'une avant-première et d'un film.

Ce même film n'a pas été subventionné par le ministère des Affaires culturelles et du Patrimoine. Les réactions négatives continuent toujours à flamber 4 jours après sa projection. Un tollé de réactions qui fait croire que cette création ne fera pas long feu dans les salles du cinéma.   


   

 

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